Le Tribunal canadien des droits de la personne blâme Ottawa une troisième fois pour le traitement réservé aux enfants autochtones

Des enfants autochtones
Photo : Radio-Canada
Prenez note que cet article publié en 2017 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Le Tribunal canadien des droits de la personne persiste et signe : le Canada est coupable de discrimination basée sur la race envers 165 000 enfants des Premières Nations.
Dans une décision publiée vendredi, le Tribunal conclut que peu de choses ont changé depuis sa décision rendue en janvier 2016. Il jugeait alors que le gouvernement était responsable de retards bureaucratiques inutiles et illégaux qui provoquent des lacunes et des refus de services publics essentiels pour les enfants des Premières Nations.
Cette décision qualifiée par le Tribunal, de « troisième ordonnance » « conclut que le gouvernement actuel a adopté la même approche au Principe Jordan, » que le gouvernement Harper en 2009 et 2012.
Nommé en mémoire de Jordan River Anderson, le Principe de Jordan est un principe qui place l’intérêt et les besoins de l’enfant en priorité pour s’assurer que les enfants des Premières Nations peuvent accéder aux services gouvernementaux dans les mêmes conditions que les autres enfants.
Ce principe se réfère à Jordan River Anderson qui est né en 1999 au sein de la Nroway Cree nation du Manitoba avec une maladie génétique rare. Il est mort en 2005.
Le Tribunal convient qu’Ottawa a affiché une volonté de changer la situation, mais que les résultats se font attendre.
Malgré les fréquentes déclarations de bonne volonté par les ministres de Santé Canada et d’Affaires autochtones et du Nord Canada (« AANC »), le Tribunal a constaté que le gouvernement fédéral n’a même pas respecté la plus élémentaire partie de la décision de janvier 2016 qui ordonnait au Canada d’adopter immédiatement le Principe de Jordan dans son sens large.
Le jugement du Tribunal souligne que « la définition du Principe de Jordan adoptée par le Canada était un choix politique calculé, analysé, éclairé et basé sur des impacts financiers et des risques potentiels plutôt que sur les besoins ou l’intérêt supérieur des enfants des Premières Nations ».
Le Tribunal fait remarquer que même la demande urgente de la Première Nation de Wapakeka en Ontario, qui démontrait l’existence d’un pacte de suicide au sein de la communauté, n’a pas été traitée avec l'attention qui s'imposait et deux enfants sont morts par suicide
La Dre Cindy Blackstock, directrice générale de la Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations, demande au premier ministre Trudeau d’intervenir pour s’assurer que les ordonnances du Tribunal soient enfin respectées.
Il est vital que le premier ministre intervienne personnellement pour s’assurer que Santé Canada et AANC se conforment entièrement au Principe de Jordan. La décision d’aujourd'hui comprend des éléments de preuve issus de l’audience du Tribunal qui démontrent que le décès d’au moins deux enfants est liée à la non-conformité du Canada. Il ne faudrait pas attendre une quatrième ordonnance du Tribunal pour amener le Canada à traiter les enfants des Premières Nations de façon juste et équitable.
Le professeur Sébastien Grammond, l’un des avocats représentant la Société de soutien, ajoute : « Il s’agit d’une décision remarquable pour les enfants des Premières Nations. Étant donné que le Canada ne s'est pas conformé aux ordonnances antérieures, le Tribunal a dû adopter une approche proactive et être très précis quant à ce que doit faire le Canada pour mettre en œuvre le Principe de Jordan ».